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Un jour, une héroïne : hommage à Ernestina Silà, alias "Titina Silà" une combattante de la liberté

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Titina Silà est née en 1943 à Tombali au sud de la Guinée-Bissau, appelée à cette époque, Guinée Portugaise. Elle reçoit, de son père, une éducation spartiate, rude et exigente. Cette éducation fait de Titina un garçon manqué. Elle n'hésite pas à défier les garçons de son âge, bien plus forts, qui venaient railler les filles sur le chemin de l'école.

Titina a eu une scolarité parfaite, pour une fille de cette époque. Elle a pu obtenir l'examen de fin de cycle au collège à 16 ans. Elle décide d'être infirmière, encouragée par ses parents. Pour la première fois, en 1959, elle quitte sa ville natale pour monter à Bissau. C'est là qu'elle assiste à un drame qui va marquer la suite de son existence.

Le 3 août 1959, l'armée coloniale massacre des marins et des dockers du Port de Pindjiguiti qui demandaient de meilleures conditions de travail. Plus de cinquante personnes ont été tuées ce jour-là et Titina a été témoin de ce carnage. L'adolescente est bouleversée. Un sentiment de révolte et d'indignation la pénètre. C'est l'effet déclencheur de son combat politique.

Elle assiste à une réunion politique tenue par le MLG (Movimento para Liberataçao da Guiné) mais elle constate que les membres de ce groupe sont tous d'ethnie manjake et felupe. Un ami lui parle alors du PAIGC (Parti Africain pour l'Independance de la Guinée et du Cap-Vert) d'Amilcar Cabral. Ce parti est à l'initiative de la grève des dockers du 3 août 1959. Elle est séduite par le discours. On met en avant l'importance de l'unité du peuple et de sa lutte pour se libérer du colonialisme. Titina est trop jeune pour intégrer le parti mais elle obtient le droit d'assister à certaines réunions.

En 1961, à 18 ans, son diplôme d'infirmière en poche, elle prend officiellement sa carte de membre du PAIGC.

Elle montre rapidement des qualités de leadership auprès de la jeunesse et elle est coopté pour suivre une série de formations politiques en Union Soviétique.

En 1963, la nature de la lutte change. Devant le refus de dialogue des autorités portugaises, le PAIGC se dote d'une branche armée.

Titina rejoint les combattants du PAIGC et devient assez vite, par son intelligence et son courage, l'un des fers de lance du mouvement, sous la férule du charismatique Amilcar Cabral. Elle est aussi chargée de la formation politique des femme dans cette lutte pour la recherche de la dignité humaine et de la liberté. En raison de ses compétences en organisation et en leadership, Cabral lui confie la direction du Comité de la milice populaire dans le nord du pays, dont la mission était d'organiser le passage des personnes et des biens sur la rivière Cacheu, d'une importance vitale pour l'approvisionnement en troupes de la résistance.

Elle est à la tête d'un escadron de plus de 200 hommes et se montre très courageuse au combat. Sa réputation de vaillante guerrière gagne tout le pays et on la considère comme une protectrice et un guide.

Pendant plus de 10 ans, Titina et ses hommes sécurisent le front Nord et gagnent de nombreuses batailles.

Le 20 janvier 1973, Amilcar Cabral, dirigeant du PAIGC, est assassiné en Guinée-Conakry. Titina Silá perd donc son mentor et son ami. Les peuples de Guinée Bissau et du Cap-Vert, eux, perdent leur chef, un homme qui s'était toujours battu et est mort pour qu'ils puissent tous vivre en liberté.

Une semaine après cet événement tragique, toujours bouleversée par le sentiment de perte, Titina dirige un canot de combattants qui se rendaient, en Guinée Conakry, aux obsèques de son camarade combattant Amilcar Cabral.

Elle tombe dans une embuscade montée par les troupes coloniales portugaises alors qu'elle amorce la traversée de la rivière Farim, dans le nord de la Guinée. Exposés aux tirs nourris des portugais et sans aucune possibilité de retraite, Titina et ses hommes périssent noyés. Nous sommes le 30 janvier 1973. Titina n'avait que 30 ans.

Neuf mois plus tard, le 24 septembre 1973, la Guinée-Bissau obtient son indépendance. Plus de 80% du territoire avait été libéré par les combattants du PAIGC.

Le 10 septembre 1974, le dernier soldat de l'armée coloniale du Portugal quitte la Guinée-Bissau.

Comme beaucoup d'autres combattants du PAIGC, qui ont donné leur vie pour l'indépendance du pays, Titina Silà et Amilcar Cabral n'ont pas non plus vécus assez longtemps pour voir ce rêve se réaliser.

À l'exemple des grandes femmes qui l'ont précédée dans l'histoire du continent, Ernestina Silà s'est battue et est morte pour ce en quoi elle a cru et aimé.

Le 30 janvier, date de son assassinat, a été déclarée "journée de la femme" en Guinée-Bissau, en hommage à cette grande combattante de la liberté mais aussi pour toutes les femmes qui se sont montré vaillantes pendant la guerre de libération de la Guinée-Bissau et du Cap-Vert. Je citerai, entre autres, Carmen Pereira, Francisca Pereira, Ana-Maria Cabral.

Crédit publication : Naounou Kore

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