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[Analyse] Côte d'Ivoire : Les enseignements de la non-élection présidentielle de ce 31 octobre 2020

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En voyant les images de certains compatriotes, brandissant fièrement la preuve de leur participation à ce scrutin contesté du 31 octobre 2020, je comprends maintenant que ce qui nous oppose n’est pas un désaccord d’opinions, mais un désaccord de principes et de valeurs.

Une société humaine se construit avant tout sur un socle de valeurs. Cette élection est donc venue confirmer comme une sorte de recensement général ou de référendum, le genre de société dans laquelle veut vivre chaque Ivoirien. Dès ce soir, à 18h, chaque Ivoirien en âge de le faire, aura choisi ʺsaʺ Côte d’Ivoire :

  • puissance financière contre bagage intellectuel;
  • résultat court-termiste contre vision long-termiste;
  • loi du plus fort contre force de la loi;
  • inimitié politique contre adversité politique;
  • unicité de la pensée contre liberté d’expression;
  • cas de force majeure contre respect de la parole donnée;
  • saine appréciation des réalités du moment contre conviction idéologique;
  • opportunisme d’une victoire électorale même injustement méritée contre honorabilité d’une victoire électorale juste et sans contestation etc.

Ce sont bien ces désaccords de valeurs qui font que certains accordent plus d’importance aux arguments d’un titulaire du Bac B option droit constitutionnel et ignorent ceux d’un Professeur comme Ouraga Obou. Ce sont ces désaccords de valeurs qui font que certains préfèrent encenser le génie politique d’un loubard milliardaire docteur honoris causa et se moquer de l’intellectualisme d’un Francis Wodié.

Ces désaccords de valeurs ont une influence à tous les niveaux des réflexions sur notre société. Qui se souvient de cet épisode au Salon de l’Agriculture à Paris avec le ministre Kobenan Adjoumani ? Les Ivoiriens se sont vivement opposés sur la lecture de cet incident. Un jeune homme a-t-il le droit d’invectiver un aîné de la sorte ? Un simple citoyen peut-il s’adresser sur ce ton à un ministre en fonction ? Un pauvre peut-il ainsi critiquer en public un homme riche et puissant ? Certains ont ressorti les principes de la préséance traditionnelle, d’autres ont évoqué le respect à la fonction arguant ainsi qu’il existerait une sorte de démocratie à l’africaine ou à l’ivoirienne qui encadrerait le caractère sacrée de la liberté d’expression, pilier de la démocratie originelle. Chaque jour, de nombreux autres exemples de ces désaccords de valeurs surgissent dans le débat politique comme autant de panneaux avertisseurs de danger sur l’autoroute de la construction de notre nation.

Je suis en colère contre moi-même de ne pas avoir vite compris l’absurdité de mes longues publications et de mes discours moralisateurs. C’était comme si je versais de l’eau sur une bouteille fermée en espérant qu’elle se remplisse. C’était comme si je tentais de faire démarrer une voiture en quatrième vitesse, sur une côte à 60°. C’est impossible, improductif, inefficace et idiot. Et pourtant je m’y suis lancé comme un Don Quichotte bataillant contre ses moulins à vent, convaincu de la noblesse du combat.

Contrairement à la croyance populaire, les Ivoiriens ne sont pas des victimes (enfin, pas tous) de la politique ou des hommes politiques. Ils sont plutôt des candidats au suicide que nous essayons vainement de ramener à la raison. Qu’est-ce qui n’a pas été tenté pour ouvrir les yeux de certains Ivoiriens, papillons de nuit éblouis par la lumière artificielle des néons de l’émergence promise ? Qu’est-ce qui n’a pas encore été essayé pour démontrer à tous qu’Alassane Dramane Ouattara est un imposteur, économiste fébrile, piètre réformateur, faux démocrate, manipulateur patenté et plus grand commun diviseur du peuple ivoirien ?

  • On a dévoilé les pièges mystificateurs de l’économie : indices macroéconomiques gonflés et manipulés, face cachée des théories louangeuses du surendettement, mensonges éhontés sur les mécanismes de fonctionnement du franc cfa, etc.
  • On a pointé du doigt les injustices sociales : faillite du système de santé, creusement des inégalités, difficultés d’accès au logement, insécurité galopante, jeunesse livrée à la drogue, justice corrompue, etc.
  • On a attiré l’attention de nos concitoyens sur la baisse inquiétante du niveau de l’école ivoirienne pendant qu’on voue un culte quasi-religieux à la construction d’infrastructures le plus souvent somptuaires.
  • On a longuement alerté sur l’iniquité du système électoral : instauration de nouvelles règles antidémocratiques et inconstitutionnelles, mise en œuvre précipitée et bâclée du processus, élimination injuste de concurrents sérieux, maintien d’une candidature illégale, etc.
  • On a montré, aux yeux de tous, le visage hideux de la dictature naissante : viol de la constitution, emprisonnement d’opposants, intimidations des élus, chantages aux populations, répression mortelle de manifestants, etc.

Malgré cela, rien ne change. Les partisans du pouvoir s’arcboutent sur leurs arguments, se réjouissent du fruit attendu d’une injustice flagrante et narguent les opposants en scandant les slogans de la forfaiture ʺun coup koʺ, ʺc’est bouclé, c’est géréʺ, ʺle meilleurʺ.

L’heure n’est clairement plus aux discours des économistes, des politologues, des urbanistes, des ingénieurs ou des experts ès machin-chose.

Place maintenant aux sociologues, aux psychologues, aux psychanalystes voire aux psychiatres. Ce pays a besoin d’une consultation urgente. Venez nous expliquer comment on peut construire une nation paisible et réconciliée si nous n’avons pas tous les mêmes valeurs.

Par Eric DOHOU, Conseiller du DG LIDER

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